Puisqu'il est heureux, on s'endormira
--> Et s'il n'est pas heureux ?
C'était beau ce matin.
Sur le pont.
Même s'il n'y avait plus de batterie dans la caméra.
On était tous gelés.
Je ne sentais plus mes doigts.
Ariane avait mis le manteau rose, a little BCBG, de Marie, mais elle avait tellement froid qu'elle a remis le sien, noir, tout simple, tout mince, par dessus.
Quand on a froid, personne ne nous trouve ridicule.
Personne ne s'est moqué de mon chapeau péruvien.
Le pont était beau à en crever.
J'en revenais pas. Je ne l'avais vu que de loin, le soir du 8.
Ce soir magique.
Et puis monsieur D est arrivé, au loin, avec ses petits cheveux en l'air, sa barbe d'un jour et demi qui le faisait complexer, et son imper râpé.
J'ai souri quand il a dit nom de dieu avec son petit accent du Sud.
Plus de batterie.
Je ne sais pas pourquoi, mais ça ne m'a pas tant chagriné que ça.
Je crois qu'aujourd'hui j'avais une force inépuisable.
Il nous a raccompagnées jusqu'à l'IUT dans sa voiture.
Et puis je suis rentrée ici, et puis je suis ressortie...
J'ai fait les courses.
Un type qui se trouve peut-être dans la même situation que le William de mon film m'a demandé si j'avais 40 cts. Au lieu de l'ignorer et de fuir son regard, je l'ai regardé dans les yeux et j'ai ouvert mon porte-monnaie.
Sa main était toute moite.
Soudain dans ses yeux, il y a eu du soleil.
C'est tellement beau le sourire de quelqu'un de désespéré.
Quelqu'un de tellement désespéré qu'il n'a plus de larmes à imposer aux autres.
C'est ce sourire là pour lequel je craque tellement.
Mais cela fait tellement longtemps que je l'ai vu.
Il doit en avoir des problèmes dans sa tête mon Prince, pour n'avoir même plus la force de sourire.
J'ai cherché puis trouvé des pâtisseries orientales.
Ça faisait plusieurs semaines que j'y pensais.
C'est sûrement lié à cette envie presque obsédante d'aller faire un tour à Epône.
C'est vital je crois.
Il faut que j'y aille.
C'est quand je me retrouve là-bas que le verbe se ressourcer prend tout son sens.
Ça ne changera peut-être rien à ma fatigue.
Mais ça nourrira une passion enfouie.
Un vide à combler.
Chaque matin je prends un petit comprimé de vitamine C.
À vrai dire je ne sais pas trop à quoi je ressemblerais si je n'en prenais pas.
Hier je l'avais oublié et j'étais à moitié dans le coma sur ma table.
Je sentais une horrible fatigue tomber sur mes paupières.
Un truc m'est poussé dans l'oeil.
Ça me fait trop mal.
Ma soeur m'a dit qu'elle avait eu la même chose il y a deux jours, et qu'après une nuit de sommeil, c'était parti.
Je suis rentrée vers 12h30.
Je me suis fait des oeufs brouillés en vitesse.
Avec des olives.
Je suis partie comme une furie vers 13h15, avec le manteau de Marie dans une main, et ma valise dans l'autre.
J'ai essayé de faire le TP de merde qu'on doit rendre vendredi midi.
Mais je n'ai commencé à comprendre que vers 13h52, et je devais être en bas à 14h.
J'ai abandonné, je suis descendue.
Les blondes étaient là.
Marie était partie me chercher.
Elle est redescendue, soulagée.
Aurore nous a emmenées jusqu'à la gare maritime.
Puis elle est repartie, et est revenue cinq minutes plus tard avec toutes celles qui manquaient.
On a fait plein de plans.
Il y avait une toute petite fille de deux ans et demi.
Marie jouait à la maman.
Elle s'accroupissait pour lui faire des bisous.
Avec ses talons (très) hauts et ses collants noirs.
Son manteau rose et sa mini robe.
C'est super la figuration, mais c'est crevant.
Dès qu'elles n'ont plus eu besoin de ma tête et de ma valise, je suis repartie.
Je n'ai pas réussi à atteindre le chemin piéton, alors j'ai marché, à la place des voitures, en faisant rouler ma valise.
Je me disais que Paul et Vincent, qui étaient en train de fumer, devaient se dire que je me prenais pour une voiture.
Je ne suis pas sûre de conduire un jour une voiture, pas sûre d'avoir un jour mon permis, pas sûre d'être capable de tenir la route, sans mauvais jeu de mots.
William Sheller dit qu'il ne conduit pas, que ce serait dangereux parce qu'il plane trop.
J'aime bien ses arguments.
La seule personne à qui j'ai besoin de sortir des arguments est mon père qui pique une crise dès que je prononce le mot code ou voiture.
Mais ça m'étonnerait qu'il comprenne ces arguments.
D'abord parce que ce sont de Sheller, et ensuite parce qu'ils n'auraient pas de valeur.
Qui, aujourd'hui, plane trop pour conduire une voiture ?!!
"Ça se fait pas d'abandonner quelque chose qu'on a commencé. Tu nous as fait perdre de l'argent. Ça se fait pas, c'est tout. On fait pas ça chez moi".
C'est dans ces moments là que j'ai envie de le traiter de connard.
Mais je me retiens. Je regarde le tapis et j'attends que ça passe.
J'suis une traumatisée, c'est tout.
Quand y'a pas d'affectif ou de passion, je ne marche pas.
Je ne peux pas.
C'est mon essence.
Et sans essence, le moteur ne démarre pas.
Avec Mam' Dubuc, c'est difficile l'affectif.
Enfin en tout cas en ce qui me concerne.
Et puis je n'ai aucune motivation. Aucune.
Je suis retournée à l'IUT, trouver un PC de merde pour finir ce putain de TP de chiotte, mais TOUS les PC étaient pris.
En y allant, j'ai croisé Gwen.
Elle m'a dit qu'elle allait au Cirque, et que si elle n'était pas là demain, c'était parce qu'elle s'était fait manger par les lions.
Je lui ai dit de plutôt faire gaffe à pas se faire enlever par les clowns.
Je me suis étalée sur mon lit pendant une demi-heure.
J'ai gonflé des ballons.
Après j'avais un goût de caoutchouc dans la bouche, et une odeur de préservatif sur les doigts.
Je suis sortie, une dernière fois, pour trouver notre nectar de morue (Burn, vous connaissez ?) et aussi une entrée.
La voisine d'en dessous est venue me rendre une petite visite.
Je lui ai expliqué que je préparais un petit dîner pour l'anniversaire de ma colocataire.
Elle m'a répondu :
-Ah bah moi, aujourd'hui, ça ferait 37 ans que je suis mariée...
Alors j'ai dit :
-Ahhhh !, avec un grand sourire.
Mais elle a ajouté :
-Oui. Si mon mari n'était pas mort si jeune.
Ça m'a saoûlé de répondre je suis désolée comme ils disent toujours dans les films.
Alors j'ai essayé de prendre un air suffisamment triste, mais je crois que j'avais l'air de m'en foutre pas mal.
Vilaine. P'tite Garce. Sans-coeur.
Et puis j'ai commencé à préparer ce cher dîner, tellement équilibré ...
("Mais si bon...", rajoute Garfu qui lit derrière mon épaule).
Et puis elle est rentrée.
Et puis on a mangé, on s'est régalé.
On a commencé à jouer avec le poisson, l'appareil de photo de Garfu et ma caméra.
Je pense que ce poisson est sérieusement taré.
Et puis...
Et puis j'ai entendu une porte s'ouvrir au premier.
J'ai murmuré Y'a le gros barbu qui va débarquer, j'le sens.
On avait à peine compté 20 secondes que notre jolie sonnette retentissait.
Bingo.
Le gros barbu.
(Et sa mère).
Il nous a aidé à faire marcher notre télé.
Sympa le gros barbu.
On a regardé un bout de Plus belle la vie.
On s'est amusé à doubler les personnages.
Et puis Garfu a pris sa douche, ma soeur m'a envoyé douze textos, et on a commencé à regarder Ma femme est une actrice, vautrées sur le parquet.
On a fini dans mon lit.
Et puis cette journée de fous se termine enfin. D'ailleurs la nouvelle est déjà commencée.
Le matin j'ai cours de 8h à 12h.
À 12h30, j'ai réunion avec le journal de l'IUT, on doit se répartir le travail, mais je n'ai aucune idée de ce que je vais bien pouvoir écrire.
À 13h30, j'ai rendez-vous sur le pont. Je ne sais pas comment je vais réussir à y être.
À 17h13, Lisa arrive à la gare.
J'ai eu le Prince pendant presque trois heures lundi soir, sur Skype.
Je l'avais eu presque une heure au téléphone avant.
C'était étrange.
Moins fort que la dernière fois.
Mais bien quand même.
Je crois qu'il y a eu une période vraiment très forte, où il devait être vraiment troublé.
Et où je l'étais aussi beaucoup beaucoup.
Et puis maintenant moins.
On continue notre vie.
Et peut-être que quand on se reverra la prochaine fois, y'aura de nouveau des étoiles dans l'air.
J'ai fait une capture d'écran pendant que je lui parlais.
Il regardait sa télé d'un air rêveur, la bouche un peu ouverte.
Il avait des cernes, un air fatigué, ses rides toujours sur son front, faute d'avoir trop froncé les sourcils dans sa vie.
Je suis contente d'avoir immortalisé cette image.
Je le trouve beau, tellement beau.
Enfin, mieux que beau.
Il me plaît, tellement.
Hier soir, quand je suis rentrée, Garfu m'a dit qu'elle avait un cadeau pour moi.
En passant devant le petit cinéma sur la route de la plage, elle a assisté à l'enlevage des affiches.
Elle a demandé au monsieur ce qu'il allait faire de la tête d'Albert Dupontel, il lui a dit qu'elle avait un joli sourire et il lui a donné.
Alors maintenant j'ai un Prince en fond d'écran, et un Albert aux yeux ténébreux sur mon mur gauche.
Lundi soir, alors que je regardais le Prince, ma main s'est inévitablement collée sur mon écran, et je me suis mise, à caresser sa joue, son nez, ses paupières, ses lèvres.
Il était presque devant moi.
Enfin il était devant moi, mais il ne pouvait pas sentir mes caresses.
Il avait le regard paumé, on aurait dit un petit enfant, rêveur.
Qui ne réagit pas vraiment, même quand on lui fait des bisous.
A-t-il besoin de ma tendresse ?
Ecrit par inconsciente, le Jeudi 25 Octobre 2007, 01:49 dans la rubrique Aujourd'hui.
Commentaires :
Coucou Poupinette.
Ca a l'air d'aller un peu mieux. Il divorce, ça doit être dur. Ton poisson rouge est mignon, et tes bougeoirs en forme de fleur =) j'aime aussi les photos de Garfu.
Beaucoup de couleur ici !
Baci bella mia (bisous)
Ca a l'air d'aller un peu mieux. Il divorce, ça doit être dur. Ton poisson rouge est mignon, et tes bougeoirs en forme de fleur =) j'aime aussi les photos de Garfu.
Beaucoup de couleur ici !
Baci bella mia (bisous)
Elwinwea
On se demande toujours avec nos Princes, nos Anges, comment Ils vont, ce qu'Ils font. On passe des heures dans notre lit à se demander s'Ils sont heureux, s'Ils arrivent à dormir (j'ai résolu le problème en me mettant sous somnifères pour quelques temps, sinon je ne dors plus du tout)...
Je comprend très bien que tu aies eu envie de toucher Son visage, ça m'a fait pareil, juste tendre la main et sentir Sa peau, entendre Son souffle même si je ne suis pas juste à côté... On Les imagine devant nous, et comme par magie Ils le sont... mais Ils n'entendent pas ce qu'on Leur dit, Ils ne voient pas les regards qu'on Leur lance...
Dure, dure la vie... Mais si belle aussi, il faut que je te raconte ce soir... je te dirai tout, promis !