01/08 - La villa
Je vous ai déjà parlé longuement de la famille de ma mère mais jamais vraiment de la famille de mon père.
En vérité, ceux qui appartiennent à la famille toute proche de mon père, c’est-à-dire père, mère, et sœurs ne sont pas les plus intéressants ni les plus sympathiques.
Ceux que moi, j’adore, sont ceux qui habitent ici, ou qui, en tout cas, reviennent régulièrement ici, à Saint-Malo et passent des soirées avec nous comme celle que je viens de passer.
À l’origine il y avait le couple Andrée-Maurice, mais Andrée est décédée il y a quelques années, et reste donc Maurice. Ils ont eu trois enfants : Marie-Pierre, Isabelle et Yves.
Marie-Pierre a une cinquantaine d’années, une longue tresse poivre et sel qui lui tombe presque au creux des reins, quelques rides autour des yeux et autour de la bouche et un charisme fantastique. Elle est un peu comme maman. Elle reflète la lumière, elle n’y peut rien. Quand elle parle, tout le monde est suspendu à ses lèvres.
Elle est professeur d’histoire-géo et a une culture incroyable.
Un puits de science. Un puits sans fond.
Elle est mariée à Jean-Paul, qui a également une cinquantaine d’année, homme assez borné mais terriblement drôle, qui aime beaucoup titiller Maurice sur des sujets comme la politique…
Ils ont trois enfants, trois garçons : David qui a trente et un ans, que j’aimais beaucoup il y a quelques années mais qui a un peu changé depuis qu’il s’est marié et a eu un bébé (il y en a d’ailleurs un autre en route).
Samuel, vingt-neuf ans, que je ne connais pas bien parce qu’il a beaucoup voyagé et n’était presque jamais là mais qui est par ailleurs quelqu’un d’adorable, il est marié à Laurence et ils ont deux enfants.
Et, le meilleur pour la fin, Thomas, le plus beau des trois, vingt-sept ans, drôle, sympathique, attentionné, intéressé et intéressant.
Thomas ne semble pas avoir trouvé chaussure à son pied, pas de copine, pas de copain, il vient toujours seul. Il est très attaché à son oncle Yves.
La deuxième fille d’Andrée et de Maurice est Isabelle, qui est mariée à Loïc et avec qui elle a eu trois enfants : Julien, Mathilde et Clarisse. Ils n’ont jamais été très sympathiques, enfin toujours très corrects, mais je n’ai jamais réussi à tisser le quart du lien que je tisse à chaque fois avec Thomas par exemple.
Enfin, le dernier enfant d’Andrée et de Maurice est Yves, qui lui ne s’est jamais marié, il vit de nouveau dans la maison familiale depuis que sa mère est décédée et s’occupe merveilleusement de son père dont la vue a terriblement baissé et à qui il lit quantité d’articles et à qui surtout il remonte le moral.
Yves est adorable, il prend toujours de nos nouvelles, il est très cultivé lui aussi, il aime la vie.
C’est une famille originale, et équilibrée, à sa façon.
J’adore la maison familiale, j’imagine mille et un scénarios se dérouler à l’intérieur, et prendre ses habitants comme acteurs.
Je vois leurs regards, des crimes cachés, les secrets de chacun, les portes qui claquent, une intrigue.
Quelque chose qui n’ait rien à voir avec la réalité.
Mais qui pourrait leur aller comme un gant.
Ils sont très forts aux jeux de rôles.
Nous avons eu, comme à notre habitude, un grand fou rire lorsque Jean-Paul a insisté pour que nous coupions en deux toutes les pâtisseries.
C’est toujours comme ça, et c’est vrai que c’est plus marrant, on peut goûter à plus de choses et c’est plus convivial.
J’ai donc partagé mon framboisier avec Jean-Paul et ma tarte au citron avec je ne sais qui.
Nous avons ensuite eu un immense fou rire lorsque je les ai fait passer par mon logiciel de photomaton qui déforme les visages…
Yves hurlait de rire, avec un rire très aigu, et Marie-Pierre gardait sa main devant sa bouche, consternée, non mais c’est pas possible ! avant de partir dans un éclat de rire incontrôlable.
Bref, voilà une bonne soirée que je suis contente d’avoir passée à discuter avec Thomas.
Thomas est prof de maths en région parisienne, mais il ne travaille pas dans un établissement comme celui que je viens de quitter.
Plutôt un de ces lycées publics où l’on préfère être respecté plutôt que d’être épaté par un résultat.
Ce qui est, d’ailleurs, assez peu probable.
Un lycée à difficultés.
Mais Thomas a l’air d’être un très bon prof, et d’abord au niveau pédagogique.
Évidemment je pensais au Prince, j’étais émue de repenser à lui lorsqu’il était en cours, émue de le revoir devant le lycée en train de fumer sa cigarette, émue de l’imaginer rejoignant la classe à laquelle il avait un cours à donner, de sa démarche nonchalante.
Pendant ce temps, il me manquait, terriblement.
J’aurais voulu qu’il soit là.
Qu’il fasse partie de la famille.
Cet après-midi, je me suis endormie en écoutant ma musique, roulée en boule dans mon duvet bleu et blanc.
Je n’arrêtais pas de penser à ce que le Prince me dirait si on passait à la phase supérieure, si cela devenait plus sérieux.
J’en avais mal à l’estomac.
Je me prenais la tête sur le fait que ma vie allait devenir un véritable bordel mais que je voulais pourtant lui consacrer une partie de moi, que je voulais le garder, l’étirer jusqu’à plus tard, jusqu’au moment où je pourrai, d’abord matériellement, faire quelque chose de nous.
Mais qu’il faudrait attendre, attendre.
Et passer par le cap train, gare, téléphone, manque, nuits écourtées, amour rapide, …
Je pense que le coup de téléphone de lundi soir m’a un peu monté à la tête et que j’y crois trop.
Vraiment trop.
Et que je vais me faire très mal.
Ce n’est pas le moment.
Mais rien n’est perdu.
Rien n’est perdu dans cette étendue de points d’interrogation.
En vérité, ceux qui appartiennent à la famille toute proche de mon père, c’est-à-dire père, mère, et sœurs ne sont pas les plus intéressants ni les plus sympathiques.
Ceux que moi, j’adore, sont ceux qui habitent ici, ou qui, en tout cas, reviennent régulièrement ici, à Saint-Malo et passent des soirées avec nous comme celle que je viens de passer.
À l’origine il y avait le couple Andrée-Maurice, mais Andrée est décédée il y a quelques années, et reste donc Maurice. Ils ont eu trois enfants : Marie-Pierre, Isabelle et Yves.
Marie-Pierre a une cinquantaine d’années, une longue tresse poivre et sel qui lui tombe presque au creux des reins, quelques rides autour des yeux et autour de la bouche et un charisme fantastique. Elle est un peu comme maman. Elle reflète la lumière, elle n’y peut rien. Quand elle parle, tout le monde est suspendu à ses lèvres.
Elle est professeur d’histoire-géo et a une culture incroyable.
Un puits de science. Un puits sans fond.
Elle est mariée à Jean-Paul, qui a également une cinquantaine d’année, homme assez borné mais terriblement drôle, qui aime beaucoup titiller Maurice sur des sujets comme la politique…
Ils ont trois enfants, trois garçons : David qui a trente et un ans, que j’aimais beaucoup il y a quelques années mais qui a un peu changé depuis qu’il s’est marié et a eu un bébé (il y en a d’ailleurs un autre en route).
Samuel, vingt-neuf ans, que je ne connais pas bien parce qu’il a beaucoup voyagé et n’était presque jamais là mais qui est par ailleurs quelqu’un d’adorable, il est marié à Laurence et ils ont deux enfants.
Et, le meilleur pour la fin, Thomas, le plus beau des trois, vingt-sept ans, drôle, sympathique, attentionné, intéressé et intéressant.
Thomas ne semble pas avoir trouvé chaussure à son pied, pas de copine, pas de copain, il vient toujours seul. Il est très attaché à son oncle Yves.
La deuxième fille d’Andrée et de Maurice est Isabelle, qui est mariée à Loïc et avec qui elle a eu trois enfants : Julien, Mathilde et Clarisse. Ils n’ont jamais été très sympathiques, enfin toujours très corrects, mais je n’ai jamais réussi à tisser le quart du lien que je tisse à chaque fois avec Thomas par exemple.
Enfin, le dernier enfant d’Andrée et de Maurice est Yves, qui lui ne s’est jamais marié, il vit de nouveau dans la maison familiale depuis que sa mère est décédée et s’occupe merveilleusement de son père dont la vue a terriblement baissé et à qui il lit quantité d’articles et à qui surtout il remonte le moral.
Yves est adorable, il prend toujours de nos nouvelles, il est très cultivé lui aussi, il aime la vie.
C’est une famille originale, et équilibrée, à sa façon.
J’adore la maison familiale, j’imagine mille et un scénarios se dérouler à l’intérieur, et prendre ses habitants comme acteurs.
Je vois leurs regards, des crimes cachés, les secrets de chacun, les portes qui claquent, une intrigue.
Quelque chose qui n’ait rien à voir avec la réalité.
Mais qui pourrait leur aller comme un gant.
Ils sont très forts aux jeux de rôles.
Nous avons eu, comme à notre habitude, un grand fou rire lorsque Jean-Paul a insisté pour que nous coupions en deux toutes les pâtisseries.
C’est toujours comme ça, et c’est vrai que c’est plus marrant, on peut goûter à plus de choses et c’est plus convivial.
J’ai donc partagé mon framboisier avec Jean-Paul et ma tarte au citron avec je ne sais qui.
Nous avons ensuite eu un immense fou rire lorsque je les ai fait passer par mon logiciel de photomaton qui déforme les visages…
Yves hurlait de rire, avec un rire très aigu, et Marie-Pierre gardait sa main devant sa bouche, consternée, non mais c’est pas possible ! avant de partir dans un éclat de rire incontrôlable.
Bref, voilà une bonne soirée que je suis contente d’avoir passée à discuter avec Thomas.
Thomas est prof de maths en région parisienne, mais il ne travaille pas dans un établissement comme celui que je viens de quitter.
Plutôt un de ces lycées publics où l’on préfère être respecté plutôt que d’être épaté par un résultat.
Ce qui est, d’ailleurs, assez peu probable.
Un lycée à difficultés.
Mais Thomas a l’air d’être un très bon prof, et d’abord au niveau pédagogique.
Évidemment je pensais au Prince, j’étais émue de repenser à lui lorsqu’il était en cours, émue de le revoir devant le lycée en train de fumer sa cigarette, émue de l’imaginer rejoignant la classe à laquelle il avait un cours à donner, de sa démarche nonchalante.
Pendant ce temps, il me manquait, terriblement.
J’aurais voulu qu’il soit là.
Qu’il fasse partie de la famille.
Cet après-midi, je me suis endormie en écoutant ma musique, roulée en boule dans mon duvet bleu et blanc.
Je n’arrêtais pas de penser à ce que le Prince me dirait si on passait à la phase supérieure, si cela devenait plus sérieux.
J’en avais mal à l’estomac.
Je me prenais la tête sur le fait que ma vie allait devenir un véritable bordel mais que je voulais pourtant lui consacrer une partie de moi, que je voulais le garder, l’étirer jusqu’à plus tard, jusqu’au moment où je pourrai, d’abord matériellement, faire quelque chose de nous.
Mais qu’il faudrait attendre, attendre.
Et passer par le cap train, gare, téléphone, manque, nuits écourtées, amour rapide, …
Je pense que le coup de téléphone de lundi soir m’a un peu monté à la tête et que j’y crois trop.
Vraiment trop.
Et que je vais me faire très mal.
Ce n’est pas le moment.
Mais rien n’est perdu.
Rien n’est perdu dans cette étendue de points d’interrogation.
Ecrit par inconsciente, le Samedi 11 Août 2007, 15:34 dans la rubrique Vacances.