J’ai l’impression que ces quinze jours de vacances ont filé à une vitesse folle.

Je me retrouve là, assise sur mon lit, comme si je venais de le quitter.

J’ai tellement eu envie de revenir, je me suis sentie tellement mal ces dernières nuits, secouée par toutes sortes d’insomnies, de cauchemars, de pensées torturantes, que j’ai l’impression d’avoir juste fait un long rêve agréable, un rêve bleu couleur de la mer, jaune couleur du sable, vert couleur pomme et multicolore couleurs des gens que j’ai revu avec plaisir.

L’impression d’avoir fait ce long rêve suivie d’un cauchemar, court mais puissant, intense, qui te fait te réveiller avec l’esprit embrouillardé et assombri.

Et qui te fait presque oublier les douceurs du beau rêve qui le précédait.

C’est comme si je venais de me réveiller, et que ces quinze jours ne constituaient qu’une nuit, une nuit agitée et agrémentée de songes plus ou moins agréables.

Je me sens réconfortée par le moelleux du matelas de mon lit adoré.

Mon dos et mon ventre qui étaient eux aussi torturés par les mauvaises pensées sont soulagés ici.

Je me sens bien dans cette chambre, c’est mon chez-moi.

Mais elle ne le sera plus pour très longtemps.

Ce chez-moi-là va disparaître, va devenir la chambre d’une petite fille de neuf ans.

Il va y avoir un nouveau chez-moi qui sera d’ailleurs un chez-nous, le chez-nous de Garfu et moi. Cette idée me plaît, elle est mieux qu’un rêve.

Ce chez-nous-là va être le nôtre, notre vrai nôtre, à l’intérieur il n’y aura que du nous, pas de pollution parentale –ou presque pas-, cela va peut-être être un peu étrange de porter ces responsabilités sur nos épaules avec nos clés, à nous, dans nos poches, nos chéquiers et nos cartes bleues, nos courses, nos repas du soir, nos brosses à dents, nos bureaux, notre Internet, notre travail de classe, nos petits boulots, nos téléphones, nos budgets, nos devoirs, …

Mais cela me plaît.

Et cette petite frayeur inévitable me plaît aussi.

C’est une bonne peur, une petite peur constructive qui ne peut engendrer que du bon.

Rien à voir avec ce qui me ronge l’estomac.

Hier soir, le Prince m’a écrit un sms en réponse au mien et me demandait pourquoi je me tourmentais, qu’il ne fallait pas, que j’allais commencer une nouvelle vie et que c’était génial.

Je lui ai répondu en lui disant que ce n’était pas ça qui me tourmentait, et qu’au contraire, cela me réjouissait, plein de bonnes choses en perspectives, des cours qui m’intéressent, une colocataire épatante, un appartement top de chez top.

Et là je lui ai dit.

Je lui ai dit que ce qui me tourmentait c’était une histoire qui me pesait depuis plus de deux ans, une histoire de procès -dont il avait peut-être entendu parler- dans laquelle je n’étais qu’un objet, tiraillé et rongé de culpabilité, un objet qui n’avait pas le droit à la parole.

Il fallait bien que je lui en parle.

Je n’ai bien sûr pas eu de réponse, et cela augmente considérablement mon angoisse, déjà présente.

La chose que je souhaite le plus c’est qu’il soit déjà au courant de mon histoire.

Cela me rassurerait à 200 % puisque cela voudrait dire qu’il a accepté de rester en contact avec moi, tout en ayant compris l’importance qu’il avait pour moi, et tout en sachant ce que j’avais vécu et fait vivre à une de ses ex-collègues.

Cependant, je ne pense pas qu’il soit du genre à se mêler des potins, pas du tout même, alors j’ai bien peur qu’il ne soit pas du tout au courant.

Et que je doive tout lui expliquer.

J’ai peur, peur d’avoir à lui donner des explications, peur d’être jugée par lui, qu’il pense que je ne suis qu’une folledingue qui veut se faire le plus de profs possible, et qui prend plaisir à les détruire par la suite.

Je ne veux pas qu’il pense ça de moi.

Je ne suis pas comme ça.

Mais je l’aime, et c’est ça le problème.

Comment ne pas penser à ce qui s’est passé la dernière fois ?

Je ne veux pas traîner cette histoire comme un boulet, je ne veux pas qu’elle me gâche la vie.
Je ne veux pas que, par sincérité et honnêteté, je sois punie.

Ce serait vraiment trop injuste.



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