Tiens on est le 14 aujourd'hui.
Demain c'est ma fête. Non, je ne m'appelle pas Assomption.
On est le 14, ce chiffre qui était tout pour moi.
Et puis qui n'est finalement plus grand chose.

J'avais rendez-vous avec Chloé devant le lycée.
Je l'ai vu de loin, tout blanc, imposant.
J'ai attendu Chloé sur le petit muret sur lequel le Prince et moi on a tant discuté.
La facade du lycée était recouverte d'échafaudages.
Plastic Cri Cri a décidé de remettre tout à neuf.
Il redonne un coup de peinture fraîche et blanche comme le saint esprit sur les murs, dans la salle des profs, ...
J'ai les larmes qui me montent aux yeux.
Je regarde sur le muret.
Il y a plein de mots écrits au blanco.
Je voudrais avoir un blanco, là, avec moi, et écrire un mot codé au Prince.

Mais j'ai pas de blanco.

J'entends soudain Mariiiiiiiiie ! derrière moi.
Chloé me saute dans les bras.
Je me sens morose.
Mais je suis contente de la voir.
On fait deux fois le tour du centre commercial, sans entrer dans aucun magasin, juste en discutant.
On décide de sortir.
On s'installe sur les escaliers du club d'escrime.
On parle beaucoup d'E, de son immaturité, de son comportement absolument insupportable.
Elle s'est engueulée avec Chloé et comme d'habitude ne veut pas reconnaître ses torts.
Avec E, si on veut se réconcilier, il faut passer pour une conne et prendre tous les faits comme étant de notre faute.
Seulement à un moment ça suffit.
Et alors plus rien.

À 16h Chloé me dit qu'elle doit aller rejoindre son chéri.
Je rentre, maussade, à la maison.
Je sens un truc bizarre en moi mais je ne sais pas ce que c'est.
Comme si quelque chose se déchirait en moi.
Mais ça ne me fait pas mal. Pas physiquement.
J'essuie quelques larmes en repassant devant le bâtiment trop blanc.
Les ouvriers -tous chauves- me regardent d'un oeil curieux.

Quand je rentre je comprends ou du moins je me persuade que c'est le sang qui commence à couler en moi qui me rend si morose.

Je me dis qu'il va appeler.
Qu'on est mardi.
Que d'habitude c'est le jour.

Et puis il ne se passe rien.
Je reste sur mon lit immobile pendant une heure, à zyeuter mon portable toutes les trente secondes.

On va chez Babou pour acheter des rideaux pour ma future chambre.
Mais y'en a pas de roses et les seuls qui me plaisent ne sont pas de la bonne taille.

Je me dis qu'il va appeler.
Qu'il est la bonne heure.

Il pleut des cordes.
À l'image de mon humeur.

Je voudrais qu'on soit inséparables.
Que l'émotion si forte qui se dégageait dans nos mails dimanche soir reste intact.
Je voudrais qu'on s'appelle tous les jours.
Qu'on se voit, souvent, très souvent.

Je suis heureuse quand il est là. Près de moi.
Je rayonne.
Toutes mes douleurs physiques et morales s'envolent.
Il n'y a plus que du bon, du bien.
La terre pourrait exploser que ça me serait presque égal.
Du moment que je peux le regarder.
Lui parler.
Être tout près de lui.

Le mal de ventre se fait vicieux, et je n'en peux déjà plus d'avoir si mal.
Qu'est-ce que c'est chiant.

J'ai les mains qui deviennent moites.
Si ce n'est pas lui qui m'appelle, alors c'est moi qui vais l'appeler.