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La roue tourne
Échanges de mails avec Clooney. Il me fait rire. Il me souhaite mon anniversaire. Il me prête un dvd. J'ai envie de le bouffer, moulé dans son jean. Les yeux coquins, les perfect à chaque fois que je dis une phrase, les autres qui s'esclaffent, ne se cachant même plus.
Mais il est trop beau, trop bien habillé, trop classe, trop bien dans ses mocassins, trop perfect pour être libre.
Ça me rend triste trente secondes et puis je me dis qu'il faut que je sourie. J'ai 18 ans. Merde alors.
Je me promets de me le garder pour me faire du bien aux yeux, et au cerveau aussi parce qu'il est un vrai puits de culture.

Vers 13h, entre ma canette de Coca Cherry et une bouchée de flan coco, je me rends compte que j'ai méga envie de voir A, le photographe du magazine dans lequel j'ai fait mon stage. Cela fait plusieurs jours qu'on se parle sur msn et il y a quelque chose qui passe entre nous. Il y a toujours quelque chose mais là on se rapproche. Par les mots écrits.
Alors je lui écris un mail en lui demandant s'il sera encore à son bureau quand je sortirai de la gare.
Je reçois sa réponse une minute après :
justement j'essayais de trouver ton numéro... sur le net

Je jubile.
Je lui donne mon numéro, il me donne le sien dans un autre mail.
J'ai un peu l'impression que quelqu'un va m'attendre quelque part. Comme le voudrait Anna Gavalda.
Quelqu'un qui n'est ni vraiment un ami, ni un membre de ma famille, ni un (ancien) prof.
Ni quelqu'un que je n'ai pas le droit de voir.

En sortant de la gare, je l'appelle, mais il ne répond pas.
Je me dis que tant pis, je vais directement là-bas, et que même s'il n'est pas là, je reverrai au moins les autres.

Je prends l'ascenseur, avec ma valise qui, pour une fois, ne pèse pas des tonnes.
Je la laisse à l'entrée du couloir.
Ben est à son bureau, je lui fais un petit coucou rapide.
Nino est aussi dans son bureau. En sueur comme d'habitude, survolté. Il est avec un type qu'il est apparemment en train d'interviewer.
Les autres bureaux sont vides.
Ben sort du sien, on discute cinq minutes sur le pas de la porte de son bureau.
Soudain au fond du couloir, la porte s'ouvre.
J'ai l'impression de me la prendre dans le coeur, comme une claque délicieuse, frissonnante.
Je tressaille en silence. Immobile.

C'est lui. C'est A. "Sourire d'enfer" comme je l'appelle.
J'attends une demi-seconde avant de me retourner vers lui, pour savourer l'état dans lequel ça me met.
Et puis je le regarde arriver.
Il est beau. Il est vraiment beau.
Ses cheveux ont un peu poussé.
Son sourire carnassier a disparu, il y a une grande douceur sur son visage.

Je me rappelle que dès le premier jour, il m'attirait.
Nino m'émeuvait et lui m'attirait.
J'adorais ses longs regards, ses rires, ses sourires.
Ce truc impalpable entre nous.
Complicité silencieuse. Humour décalé.

Il m'embrasse, va poser son sac dans son bureau.
Pendant ce temps j'apprends à Ben que je fête aujourd'hui mes 18 ans.
Il commence alors à énumérer toutes les choses que ça change.
A revient. Il s'asseoit sur l'un des fauteuils du couloir. Il écoute paisiblement notre conversation, il semble attendre que je ne sois plus qu'à lui. Et puis il finit par me regarder et par murmurer bon anniversaire...
Comme s'il n'avait pas oublié, comme s'il attendait un moment particulier pour me le souhaiter.

Ben s'en va.
Je rejoins A dans son bureau, il prend ses sacs, me propose d'aller boire un verre ou de me raccompagner. Je lui réponds : "les deux !".
En repassant dans le couloir, Nino me voit partir.
Il s'exclame "déjà !" et sort de son bureau.
Il m'embrasse, me souhaite un "super joyeux anniversaire un peu en retard mais désolé je n'ai pas le temps d'écrire des mails !"
Je le rassure en lui disant que c'est aujourd'hui-même.
Il me réembrasse.
Il me demande "alors c'est 18 ans, c'est ça ?!"
Je lui réponds que oui.
Il m'embrasse de nouveau, pour l'occasion, parce que quand même 18 ans...

Je rigole.
Il est touchant de se mettre dans des états pareils pour si peu.
Mais toujours souriant.
Trop souriant pour être célibataire.

Je pars avec A, on va boire un coca dans le café d'en-face.
Plein de jeunes qui s'la pètent ont déjà envahi les lieux.
Ils font une partie de cartes endiablée en hurlant des conneries.
On se sourit. On se demande si on a vraiment été comme ça.
On discute. On se raconte nos semaines.
Je me délecte de parler avec lui.
Il s'intéresse à moi. Ça fait du bien.
Il est là, avec moi, pour moi, pas pour le verre de coca, ni pour la serveuse.
Juste pour moi.

Il me pose des questions, il me demande ce que veulent dire les bracelets que j'ai autour du poignet, il me demande quels sont mes rapports avec mes parents, etc.
Très vite je ne peux faire autrement que de lui parler de mon histoire.
Immédiatement, il pense que la personne avec qui j'ai "commis l'irréparable" qui a déclenché une tornade dans la famille est un homme.
Dans le vacarme et dans cette ambiance de presque bonheur où je me sens pousser des ailes, je ne parviens pas à lui dire que ça n'était pas un homme mais une femme.
C'est délicat.
C'est la première fois que nous nous parlons de nous, en tête-à-tête.
Je ne veux pas qu'il s'imagine des choses. Je ne veux pas qu'il s'imagine que je ne m'intéresse pas à lui parce que je suis sortie avec une femme et que je l'ai aimée passionnément pendant près de trois ans.

Il me parle un peu de lui aussi.
Il me montre plein plein plein de photos.
Des photos qu'il a prises, des photos qu'il aime mais qui ne sont pas de lui, des tas de choses que je ne connais pas.
Ses photos me touchent. Il dit qu'elles ne cassent pas trois pattes à un canard mais moi elles m'émeuvent. Elles me font sourire, écarquiller les yeux, m'émerveiller.
Il existe des gens bien plus doués que lui, des photographes incroyables mais...

Mais à son échelle et aussi parce que c'est lui, son travail me plait, me touche.

Au bout d'un moment, on se lève, il paye, on s'en va.
Il allume une cigarette. Je jubile encore plus. Je ne savais pas qu'il fumait.
Jamais je ne l'avais vu fumer. Jamais il ne participait aux pauses clopes des autres.
Jamais il n'a fumé pendant les reportages où je l'accompagnais.

Cette idée me plaît parce qu'il n'a pas l'air accro.
Parce qu'il délaisserait bien sa clope pour autre chose.
Parce qu'il préfère prendre des photos que fumer.
Mais il fume, quand même.
Ses vêtements n'empestent pas le tabac froid, mais je sais désormais qu'auprès de lui, je pourrai sentir le délicieux parfum de la cigarette qu'on allume.
C'est un détail, idiot.
Mais j'aime les détails idiots. Infimes. Insignifiants.

Il a une grosse voiture. Une grosse voiture de père de famille, genre un espace. Pour lui tout seul.
-Tu peux mettre ta valise à l'arrière...
-Ok. À la place du siège bébé et de là où se mettent les enfants... haha.
-Oui. Mais y'en a pas. J'te jure hein.

Quand on arrive près de chez moi, il me dit qu'il peut m'arrêter dans la rue d'avant si je veux.
Je lui dis que non, qu'il peut aller dans ma rue, qu'il y a sûrement de la place.
-Nan mais c'est parce que si jamais tes parents t'espionnent et tout, si tu veux pas qu'ils...
-Ah non mais c'est fini ça, ho, je fais ce que je veux, et puis j'ai 18 ans aujourd'hui.
Il rigole.
-Je viens de réaliser mais en fait c'est terrible, dès que je raconte mon histoire, les autres ont peur de moi, ils se disent que c'est dangereux d'être...
-Non non ça va, mais c'était pour toi, pour pas que...

Ça fait compliqué comme ça, mais pour une fois qu'une relation est simple.

Tellement plus simple.

On est arrêté dans ta voiture, en face de la maison de mes parents.
Il est environ 19h. Nous sommes le 14 mars 2008. J'ai 18 ans aujourd'hui-même.
Assise à côté de toi, je prends enfin conscience de ce que ce jour veut dire pour moi.

On se dit aurevoir doucement, on parle déjà de la prochaine fois, je te ferai essayer ma tablette graphique, et puis je t'accueillerai peut-être en septembre, quand tu deviendras prof de photo dans un lycée du Havre, ...

Tu es l'une des seules personnes que je connaisse qui, quand elle "fait la bise", embrasse vraiment l'autre sur la joue.

Je ne sais pas trop si c'est moi qui ai l'impression que tu m'embrasses près de la bouche, plus près que d'habitude, si c'est encore un film que je me monte. Mais après tout voilà. Je me sens bien avec toi. Je suis moi-même. Tu m'attires. Tu me plais. Depuis le premier jour. Tu m'intéresses. Il faudra juste qu'un jour je te dise que la personne d'avant était une femme. Mais c'est finalement bien peu.

À 23h40, je reçois quelques mots de toi en réponse aux miens.

À très vite alors ..
mais attention à
toi merry .. G un
sourire d'enfer
puisque je ne
suis pas un ange
.. ;)

Quel bel anniversaire finalement.
Je me suis offert ce petit cadeau là.
Mon petit cadeau à moi, de moi.

Je suis rentrée à la maison, j'ai recommencé ma vie.
Cet après-midi je suis allée voir mon grand-père, qui a sombré dans une sorte de coma.
Ma grand-mère m'a laissé quelques minutes avec lui pour aller parler avec ma mère dans le couloir.
-Je ne veux rien te cacher. Je ne sais pas ce qu'il entend, je ne veux pas qu'il entende des choses qui le rendraient plus triste et plus mal qu'il n'est déjà.

Je suis restée assise tout près de lui.
Sa main dans la mienne.
Parfois il hoquetait. Parfois il avait un sursaut et me serrait la main.
Ses yeux restaient à moitié ouverts. Vides.
Sa bouche ouverte.
Ce n'était à la fois plus lui et toujours lui.

J'ai souri en respirant une bribe de son parfum.
J'ai repensé à Parle avec elle.
J'ai pensé que ma grand-mère était la femme la plus merveilleuse du monde, l'être humain le plus courageux du monde, et que même dans ce moment terrible qu'elle vivait, elle pensait toujours à le raser et à le parfumer, comme toujours.

Ses respirations étaient chargées, comme un ronflement.
Mais à travers ces souffles rauques, je l'entendais, j'entendais sa voix, je me rappelais ses raclements de gorge si particuliers.
Quand je m'endormais, dans la chambre rose, celle au-dessus de la salle à manger, j'entendais ma grand-mère parler et mon grand-père se racler la gorge. Cela me rassurait.

Je lui tenais la main, la caressais. Je lui parlais dans ma tête. De tout l'amour que j'avais pour lui. Je le remerciais de m'avoir sauvée, lui aussi.
Je lui parlais de moi. Je pensais à A.
Je me disais que j'avais la vie devant moi mais qu'une voiture pouvait m'écraser demain.
J'ai presque regretté de n'avoir osé embrasser A hier, en quittant sa voiture.

Elle me disait toujours que j'agissais comme un TGV, voulant toujours presser les choses.
Mais j'ai toujours voulu agir spontanément. Faire ce dont j'avais envie au moment où j'en avais envie.
Pourquoi attendre.
Pourquoi attendre avant d'essayer d'être heureux ?
Les conventions m'ont toujours tellement fait chier.

Maintenant plus de conventions, plus d'interdictions.

Oh et puis j'en sais rien. Je veux pas me faire de films. Mais celui que je me fais malgré tout, fait que je me sens mieux, bien mieux.
Demain toute ma famille et tous mes amis (ou presque) viennent ici fêter mes 18 ans.

Le drame arrivera sûrement bientôt.
Mais ce n'est pas une raison pour m'arrêter de vivre.

Ma Garfu est formidable, fabuleuse.
J'ai des camarades de classe géniaux avec qui j'ai passé une excellente soirée mercredi dernier.
Je suis allée rendre visite à Mickey, j'ai rencontré un beau William, et plein de grosses peluches sympatoches.
J'ai retrouvé tout l'amour que j'avais pour mon père, tout cet amour que j'avais perdu dans je ne sais quel carton.
Et je me sens presque amoureuse.

Je lui avais promis qu'il arriverait jusqu'à mes 18 ans.
Je lui avais juré.

Et ouf, j'ai tenu ma promesse.

Endors-toi dans la paix mon papane. Ce n'est pas humain que tu partes si tôt, si vite, après de pareilles souffrances.
Mais pour moi, tu es toujours dans ton jardin, à couper tes rosiers. Même lorsque je suis là près de toi, dans cette chambre blanche, même alors que tu ne te rends plus compte qu'il y a quelqu'un à côté de toi, même si tu as plein de tubes partout.
Dans ton jardin à couper tes rosiers.
Cette image ne s'en ira jamais.
Tu es le plus grand philosophe que je connaisse, le meilleur des psychologues, le meilleur des médecins, tu vivras toujours en moi.
Tu es toujours là.


Ecrit par inconsciente, le Samedi 15 Mars 2008, 23:16 dans la rubrique Aujourd'hui.

Commentaires :

Elwinwea
Elwinwea
16-03-08 à 11:19

C'est beau tout ce que tu écris...

Il y a des situations miroirs entre nous, tellement qu'il faudra vraiment qu'on en parle. J'espère que tu vas profiter de tes dix-huit ans pour faire plein de belles choses et pour ne plus te poser de barrières pour rien ! J'aime bien, parce que A. est l'initiale d'un pseudo qui me touche, et qu'ils ont pas mal en commun... 

 
Chivato
16-03-08 à 18:14

Je fais partie de ces lecteurs anonymes qui apprécient ton écriture et qui suivent tes "aventures" ici.
Aujourd'hui j'ai trouvé tes mots pleins de sérénité, de calme. C'est apaisant ce bonheur qui se dégage.
En lisant tes articles j'ai saisi ce que tu avais vécu et que tu n'as pas encore totalement dit à celui qui t'attire actuellement. Mais chaque chose en son temps après tout. D'ailleurs tu vois qu'il n'est pas toujours nécessaire de se presser ;)
C'est par rapport à ce que tu écris : "Elle me disait toujours que j'agissais comme un TGV, voulant toujours presser les choses. Mais j'ai toujours voulu agir spontanément. Faire ce dont j'avais envie au moment où j'en avais envie. Pourquoi attendre. Pourquoi attendre avant d'essayer d'être heureux ?"
Je me permets d'avancer une réponse (tu en fais ce que tu veux) : elle avait certainement ses raisons de vouloir attendre ainsi tu ne crois pas ? car si toi tu ne risquais rien et n'avais pas réellement conscience de ce que votre relation impliquait, elle de son côté devait savoir que le risque était grand pour elle. Ce qui d'après tes écrits s'est d'ailleurs avéré vrai puisqu'elle a été condamnée et qu'en plus elle t'a perdue. Il ne s'agit donc pas vraiment de convention, mais de précaution non ? Elle n'était pas comme toi et n'avait pas ton insouciance, ton inconscience (totalement légitime de ta part de toute façon).
Ce qui est bien pour toi là, c'est que continues de vivre par amour, pour l'amour. Toi tu as tout gagné en fait. Dommage pour elle (qui a tout donné et tout perdu comme tu l'as écrit autre part, même si je trouve ça un peu excessif comme propos, mais c'est ton style je crois), et tant mieux pour toi. Même si en fait elle a joué un beau rôle dans ta vie, celui de te faire découvrir la beauté de l'amour et le fait d'être aimée. Ce qui n'est pas négligeable.
La roue a donc tourné, ce qui est normal, c'est le principe même de la vie. (détail : tu as un vrai don pour trouver des titres pertinents à tes articles tu sais ?)
En tout cas, tu as effectivement eu un bel anniversaire, et ce sentiment d'être "presque amoureuse" commence bien tes 18 ans ; c'est un bel augure :)

 
inconsciente
inconsciente
16-03-08 à 22:25

Re:

Est-elle normale cette impression de te (re)connaître ?

Merci pour ce long commentaire.
Et merci aussi de me dire que je sais bien trouver les titres parce que je t'assure que c'est vraiment l'un des points sur lequel je "galère"...

 
Chivato
16-03-08 à 22:13

Bah, vous êtes tellement belle dans vos mots que je n'ai rien à dire de plus que Elwinwea. Acceptez que je vous aime et que je vous souhaite cet anniversaire exceptionnel.

amitiés


 
inconsciente
inconsciente
16-03-08 à 22:26

Re:

Merci merci merci.
Plein d'amour dans cette journée, je prends le vôtre, en plus, avec grand plaisir.

:)